En tant que chirurgienne plasticienne, comment percevez-vous le lien entre l’image corporelle et le désir ?
La chirurgie plastique, loin de se limiter à l’esthétique, touche à des dimensions profondes : l’image de soi, le regard des autres et le désir. Elle incarne le besoin de réconcilier le corps vécu avec le corps rêvé, dans une société où l’apparence devient souvent le miroir du désir d’être, d’aimer et d’être aimé.
Pour moi, il est clair qu’il faut se sentir bien dans son corps, de s’aimer comme on est pour pouvoir transmettre son bienêtre, pour se sentir désirable et pourtant le désir.
Avez-vous remarqué que des personnes viennent vous voir non seulement pour des raisons esthétiques mais aussi pour renouer avec une forme de désir, de plaisir ou de confiance intime ?
La chirurgie plastique transforme le corps visible, mais elle agit aussi sur le sentiment d’identité corporelle. Un individu peut ressentir plus de confiance, ce qui modifie ses relations affectives et sexuelles :
- Une personne opérée peut se sentir plus désirable, donc plus apte à désirer l’autre.
- Cela peut réactiver un élan érotique ou affectif, jusque-là entravé par une honte ou un complexe.
- Cependant, certains restent insatisfaits après l’intervention, car le désir profond n’était pas tant lié au corps qu’à un mal-être plus diffus (d’où l’importance de l’accompagnement psychologique).
De confiance en soi, tout court, et puisque selon les culturelles, l’éducation sexuelle, la façon comme santé intime est perçu ou a été instruit les personnes peuvent se demander si avec un tel ou tel changement corporel, peuvent se sentir mieux, pour avoir plus de confiance en eux-mêmes.
Comment distinguez-vous une demande motivée par une réelle souffrance corporelle d’une demande influencée par des diktats sociaux ?
Nous avons pleins des demandes influencées par les diktats sociaux, c’est nous les médecins, les chirurgiens qui sommes à l’écoute pour examiner le corps et savoir si ceci est atteignable o pas, pour moi le plus important c’est de pas mettre en danger une personne pour atteindre un résultat qui ne sera pas à la hauteur, qui ne sera pas harmonieux.
Par exemple, la lipoaspiration ce n’est pas une méthode pour maigrir, puisque, il faut un changement de style de vie : nutrition, sport, etc. pour aboutir à la perte de poids, mais dans certains cas pour des amas graisseux résistants, malgré les efforts, c’est un coup de pouce pour finaliser un processus d’amaigrissement. Le plus beau résultat c’est quand les personnes s’investissent en continuer les efforts alimentaires et de mise en forme.
C’est l’examen physique qui permet d’évaluer et de savoir si la demande est possible ou pas, si une telle procédure pourra ou pas donner les résultats souhaites, puisque pas toutes les morphologies peuvent se permettre des changements excessifs harmonieux. La chirurgie a c’est pouvoir, mais ce n’est pas pour tout le monde
La chirurgie intime et la sexualité
Vous proposez des interventions d’esthétique gynécologique : quelles sont les plus fréquentes, et que viennent chercher les femmes dans ces actes ?
La plus fréquente est la chirurgie de réduction des petites lèvres ou nymphoplastie.
Les femmes cherchent à corriger la sensation d’inconfort généré par l’excès des tissus au niveau de la fente vulvaire, sensations de pincement, de frottement, de doleurs et parfois des gênes lors des rapports sexuels. La chirurgie consiste à réduire la taille des petites lèvres par rapport aux grandes lèvres, la nymphoplastie ou labiaplastie.
Comment accompagnez-vous les femmes dans leur réflexion avant une intervention ? Existe-t-il un travail préparatoire psychologique ou sexologique que vous recommandez ?
L’accompagnement commence par l’écoute de ses sensations, de leur ressenti, de la demande, puis et pour moi le plus important, une évaluation de leur anatomie à l’aide des photos, pour que nous voyons ensemble ce qu’elles trouvent gênant.
Ensuite, je montre des photos, des différents types d’anatomie, pour comparer, pour qu’elles voient que la normalité n’existe pas, mais c’est qui est possible ou pas de changer avec une procédure chirurgicale
Pouvez-vous nous parler du type d’opérations de l’intime que vous effectuez ?
Les interventions sont variées, mais les plus courantes sont la nymphoplastie ou réduction des petites lèvres, le regalbe des grandes lèvres, la plastie de réduction du capuchon clitoridien, la vaginoplastie ou vulvo-périnéoplastie, et le transfert de graisse autologue /nanofats dans le cadre de la médecine régénératrice pour les cas d’atrophie vulvo-vaginale : post-menopause, post-chimiothérapie, lichen scléreux vulvaire.
Quels changements vos patientes rapportent-elles après ce type d’intervention, notamment dans leur vie intime ou sexuelle ?
Une meilleur confiance en soi ; Cependant, certains restent insatisfaits après l’intervention, car le désir profond n’était pas tant lié au corps qu’à un mal-être plus diffus (d’où l’importance de l’accompagnement psychologique).
Le désir au-delà de l’apparence
Selon vous, le désir est-il uniquement une affaire de corps ou aussi de regard sur soi ?
Le désir est central, bien que rarement exprimé de manière directe dans le discours médical. Il peut se manifester à plusieurs niveaux :
Désir d’être aimé ou désirabilité : plaire aux autres, être regardé.e avec envie ou tendresse.
Désir de puissance sur soi : prendre le contrôle de son apparence, se réapproprier son corps.
Désir d’identification : ressembler à un idéal (célébrité, influenceur, archétype genré, etc.), parfois dans une dynamique mimétique (selon René Girard).
Désir de réparation : effacer les marques du temps, d’un traumatisme, d’une grossesse, d’un cancer, etc.
Je pense que le regard sur soi est très important, il y a des personnes que sont très charismatiques, qui ne rentrent pas selon les critères de beauté et que sont très désirables. Pour moi, c’est la façon comme la personne se projette, comme elle transmette sa personnalité qui la rendre désirable.
HEALTHCIE